« Faire plus avec moins », tel serait donc l’adage des directeurs commerciaux en 2024 ? C’est en tout cas la conclusion de l’enquête Uptoo réalisée auprès de 500 professionnels du monde de la vente. Cette surprenante devise cache 3 défis majeurs auxquels les directions commerciales doivent faire face en cette année post-inflationniste qui impose de nouvelles conditions au monde du travail. Quels sont ces 3 enjeux de taille pour les commerciaux et leurs directeurs et comment interpréter cette résolution à doper la performance en minimisant les coûts ? Analyse et décryptage d’un phénomène inédit.
2024 doit être l’année de l’efficacité commerciale
84% des directeurs commerciaux désignent l’efficacité des leurs équipes commerciales comme étant l’enjeu numéro 1 de l’année 2024, d’après les chiffres publiés par Uptoo. Une priorité talonnée de près, à 81%, par la nécessité de garder les commerciaux motivés et d’empêcher leur départ. Ces chiffres sont à mettre en perspective avec les estimations des directeurs commerciaux concernant la croissance de leur entreprise cette année. En effet, 38,7% d’entre eux estiment que leur entreprise atteindra un niveau de croissance situé entre 0% et 5%, et ils sont 21,3% à penser que celle-ci sera de l’ordre de 5% à 10%. Sans surprise, ils sont 40,4% à se dire moyennement confiants s’agissant de l’atteinte de leurs objectifs en 2024, contre 29,8% à se dire confiants et seulement 12,8% à s’estimer très confiants.
Cette réserve manifeste s’explique par les soubresauts économiques qui ont traversé les entreprises ces derniers temps. Si l’inflation galopante de ces dernières années appartient au passé, les séquelles qu’elle a laissées sur le marché sont encore fraîches : des clients plus frileux, des budgets plus difficiles à débloquer et une raréfaction des projets. Les décideurs font montre de prudence et attendent de leurs commerciaux d’être encore plus efficaces, mais avec des moyens réduits, autrement dit, savoir faire plus avec moins pour faire redémarrer une croissance que la majorité juge trop faible.
Un souhait qui semble faire écho au constat fait par les équipes commerciales elles-mêmes puisque 81% des commerciaux interrogés souhaitent être accompagnés pour améliorer leur efficacité. Une demande au coude à coude avec la volonté de voir sa motivation décuplée puisque 85% des commerciaux attendent de leur entreprise qu’elle trouve les moyens de les retenir. Une véritable volonté commune de trouver les moyens d’optimiser la performance. Et pour permettre aux commerciaux d’être encore plus performants, les directeurs misent beaucoup sur la digitalisation des méthodes de vente et la formation de leurs équipes.
L’enjeu de la digitalisation des méthodes de vente
Accélérer la digitalisation des méthodes de vente, c’est l’objectif prioritaire de 61% des directeurs commerciaux qui voient dans la révolution numérique une porte ouverte pour saisir de nombreuses et nouvelles opportunités. 20% d’entre eux considèrent que le manque d’optimisation de leurs méthodes de vente représente un obstacle majeur à l’atteinte de leurs objectifs en 2024. Améliorer les outils mis à dispositions des commerciaux, comme les CRM et les solutions offertes par l’IA, générer davantage de leads, développer le marketing digital, sont autant de chantiers qui s’ouvrent pour les équipes commerciales. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les défis à relever sur le terrain de la digitalisation sont nombreux.
Comme le révèle Uptoo, jusqu’à 70% des entreprises utilisent mal leur CRM alors que les études prouvent qu’un commercial correctement équipé en outils digitaux est 35% plus productif. Pourtant, 72% des commerciaux interrogés réclament l’instauration d’un CRM ou une amélioration de celui déjà utilisé. Une faille déjà identifiée par les commerciaux qui sont 62% à indiquer qu’un CRM correctement utilisé boosterait leur performance. À l’heure où les entreprises se relèvent d’une période de forte inflation, la concurrence se révèle rude et il n’est plus possible de faire l’impasse sur une stratégie efficace et correctement implantée sur internet. C’est sur la toile que se rendent 80% des prospects avant de franchir le pas de l’achat.
Encore faut-il que règne, au sein de l’entreprise, une bonne coordination entre les équipes marketing et commerciales afin de mener des actions conjointes dans la contextualisation et la personnalisation de la relation client et du cycle de vente. Les directeurs commerciaux comprennent tout l’intérêt de l’alignement du marketing et du commerce et mise sur une internalisation des pratiques et des stratégies marketing dans le but de doper leur action commerciale. Ce revirement de stratégie annonce l’ère du self-made et de la créativité décuplée et pose, par la même occasion, la question de l’avenir des agences marketing. Faire plus avec moins, en renforçant la collaboration entre les équipes dans le but de réduire les coûts et de favoriser la croissance ne peut qu’entraîner un bouleversement dans le paysage de ces entreprises prestataires.
Favoriser le coaching pour booster la motivation des commerciaux
Le manque de formation des commerciaux inquiète 48% des directeurs interrogés et un grand nombre de commerciaux abondent dans le même sens puisqu’ils sont 18,7% à réclamer plus de formation et 17,9% à avoir besoin de plus d’accompagnement de la part de leur entreprise. Formation, motivation et efficacité forment un cercle qui peut s’avérer vertueux ou vicieux selon les moyens déployés par l’entreprise. Dans la vente, plus un commercial est formé, plus il est motivé et donc efficace, à en croire les 61% des commerciaux interrogés affirmant que la formation est le premier levier de motivation, avant même la rémunération.
Pour mieux encadrer les équipes et répondre aux attentes des commerciaux en matière de formation, l'entreprise doit réinventer le rôle de manager. Cette nécessité est d’autant plus forte que 74% des commerciaux demandent une redéfinition de leurs objectifs, preuve que l’encadrement des équipes doit être révisé. Par ailleurs, 78% des commerciaux réclament plus de formation et de coaching et tout porte à croire que le message a bien été reçu par une part non négligeable des employeurs puisque 36% des directeurs commerciaux disent avoir conscience que la perte de motivation de leurs équipes représente un obstacle de premier ordre pour la performance globale de leur entreprise en 2024.
Ces demandes conjointes des directeurs commerciaux et des équipes commerciales pour plus de coaching, plus de formation et plus de soin apporté à l’onboarding cimentent un peu plus la stratégie des entreprises à miser sur l’internalisation. Être mieux formé pour être plus performant dans son métier mais aussi plus efficace de manière globale pour l’entreprise, afin de s’affranchir au maximum des prestataires externes et de limiter les coûts, voilà toute la logique qui anime les décideurs déterminés à voir la croissance repartir le plus vite possible. Un état d’esprit qui interpelle alors que les indicateurs économiques ne devraient pas alerter les chefs d’entreprise.
Vouloir faire plus avec moins en entreprise, une première hors période de crise
« Faire plus avec moins » pourrait être le mot d’ordre des entrepreneurs en temps de crise. Pourtant, la crise, ce n’est pas ce que vivent actuellement les entreprises françaises. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder les profits inégalés récemment réalisés par les sociétés cotées en bourse. Les entreprises plus modestes n’enregistrent pas de pertes de profitabilité, le nombre de faillites est stable, tout comme celui du nombre de personnes sans emploi. Même les chiffres de l’enquête Uptoo, qui indiquent que 25% des commerciaux se disent confiants concernant la réalisation de leurs ventes en 2024 et 35,5% qui estiment pouvoir atteindre leurs objectifs annuels, confortent la vision d’un marché serein. Un revirement de situation puisque les commerciaux craignaient, pour la majorité d’entre eux, de ne pas atteindre leurs objectifs en 2023. Aussi, réagir comme en tant de crise alors que l’on ne traverse pas cette situation est une première qui mérite d’être analysée.
Une fois les secousses de l’inflation dissipées, la période post-inflation a démarré de façon abrupte. Les employeurs ont brutalement stoppé les augmentations de salaire et les actifs voient depuis l’accès au crédit, notamment immobilier, se compliquer. Et pour cause, en rendant l’accès au crédit difficile, la dépense est stoppée, la demande également et l’inflation s’arrête. Cette nouvelle logique économique a le tort d’être particulièrement perturbante pour les employeurs et les salariés, déjà plongés dans un climat ambiant pessimiste et anxiogène en raison d’épreuves et d’incertitudes sur la scène nationale et internationale. Cette ambiance pessimiste et paralysante, renforce la phase actuelle de ralentissement économique et crée de l’attentisme, alors même que le climat des affaires, lui, est plutôt stable.
Force est de constater que l’atmosphère négative qui s’empare de la société a un impact très tangible sur la manière dont les employeurs et leurs directeurs décident de prendre les choses en main. Et leur réponse à cette inquiétude générale se traduit par une volonté de limiter au maximum les coûts en misant sur l’internalisation et la maximisation de la performance de leurs équipes, et en particulier des commerciaux. Le but ? Faire repartir la croissance à tout prix, comme si l’avenir de l’entreprise en dépendait alors même que sa rentabilité est stable. Cette attitude, naturelle en début de crise ou en période de crise imminente, est inédite alors que le marché n’a pas manifesté de signal d’alerte.
Efficacité, digitalisation et formation, c’est la règle de trois des directeurs commerciaux en 2024. Échaudés par des années d’inflation incontrôlable, ils affrontent désormais les nouvelles règles du jeu de l’après inflation et font face à un climat général pessimiste et angoissant. Leur volonté de supprimer au maximum les coûts, comme on le ferait en période de crise, trahit les inquiétudes profondes des entrepreneurs en ces temps assombris par les guerres et les incertitudes sociétales.