Si les salaires des salariés du secteur privé sont discutés et analysés sous toutes les coutures, la rémunération des fonctionnaires apparaît plus opaque. Dans cet article, nous décortiquons les composantes de la rémunération des salariés du public et discutons de la pertinence des primes au mérite pour les fonctionnaires et les agents publics.
1000 métiers, 29 filières professionnelles, 5,7 millions d’agents. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les chiffres qui façonnent la fonction publique en France sont plutôt vertigineux. Travailler pour l’État, c’est ce que fait un salarié français sur 5, en tant que fonctionnaire, agent ou militaire. La fonction publique, cette énorme machine dont la hiérarchie est à 3 niveaux, correspondants à différentes catégories (A, B et C), concerne aussi 3 versants, la fonction publique d’État, la territoriale et l’hospitalière.
Côté rémunération, des différences existent aussi selon le versant et la catégorie. Ainsi, un salarié de la fonction publique d’État perçoit en moyenne 2 639 euros nets par mois, tandis qu’un salarié de la fonction publique territoriale obtient environ 2 019 euros nets mensuels. Mais les composantes de la rémunération de chaque agent et fonctionnaire varient encore plus quand on y regarde de plus près. Composée d’un salaire fixe calculé en fonction des qualifications, des fonctions et de l’expérience du salarié, la rémunération est complétée par des primes dont la nature et le montant changent d’un corps de métier à l’autre. Car des primes, les salariés du public en perçoivent aussi.
23,6% du salaire des agents publics et fonctionnaires correspondent ainsi à différentes primes. Ces différents bonus correspondent aux fonctions et à l’expertise des salariés concernés et certains sont attribués au mérite. Le mérite, c’est précisément ce que souhaite valoriser davantage le gouvernement qui planche sur un projet de loi sur la fonction publique dont un volet est consacré à une restructuration de la rémunération des agents. Dernièrement, un récent rapport indiquant que ces primes avaient vocation à rester minoritaires et ne concerner que 15% des agents de catégorie A, 12% de ceux de catégorie B et 10% des agents de catégorie C, sans aller au-delà.
Toutefois, il semble logique que ce qui fonctionne dans le privé soit également pertinent dans le public. Aussi, valoriser le mérite à travers la rémunération est une excellente manière de booster la performance des agents de la fonction publique. La vraie question à se poser est comment mesurer pleinement la performance d’un fonctionnaire ou d’un agent public ? Si dans le privé, l’usage veut qu’un indice de satisfaction clients permette de mesurer la performance qualitative des salariés, la fonction publique pourrait, par exemple, recourir à des enquêtes de satisfaction adressées à chaque personne ayant eu un contact direct avec un agent public.
En revanche, la fonction publique impose d’ajuster la prime octroyée à l’ensemble du service concerné. Ainsi, les primes au mérite devraient davantage être collectives et non totalement individuelles. Ces évaluations permettraient ainsi d’avoir une vision plus claire de la performance d’un service public et de récompenser ses agents pour chaque objectif atteint par le biais d’une prime collective. Du reste, la rémunération au mérite représente un véritable atout pour la fonction publique.
Jusqu’à présent, être fonctionnaire signifiait obtenir la garantie d’avoir un contrat à vie. C’est principalement la raison pour laquelle les salariés du public acceptaient de percevoir un salaire en moyenne légèrement inférieur à celui qu’ils auraient pu gagner dans le secteur privé. Cette différence de rémunération correspondait, en quelque sorte, à une forme d’assurance payée pour être sûr de ne pas perdre son emploi. Le maintien de cette garantie est également discuté par les décideurs politiques dont certains veulent la voir supprimer.
Mais la suppression de l’assurance d’avoir un emploi à vie signifierait l’obligation d’augmenter les salaires afin de les aligner sur le privé. Là encore, la rémunération apparaît comme une solution pour augmenter significativement les salaires sans créer de coût supplémentaire à l’employeur, en l’occurrence l’État. En outre, l’introduction d’une véritable politique de rémunération variable, adaptée à la fonction publique, permettrait de créer un appel d’air stimulant les vocations et rendant la fonction publique de nouveau attractive pour les jeunes talents. En revanche, sanctionner le défaut de performance par un licenciement semble être un projet moins pertinent.
Sans l’ombre d’un doute, la rémunération variable bénéficierait aux agents de la fonction publique autant qu’elle bénéficie à ceux du secteur privé. Prioriser les primes collectives, redonner de l’attractivité aux carrières de fonctionnaires et d’agents publics fait partie des principaux atouts des bonus octroyés au mérite.