Cette année encore, le pilotage de la fonction commerciale sera au cœur des priorités de très nombreuses entreprises, pour relancer une activité ébranlée par la crise sanitaire et réenclencher un cycle de croissance. Dans ce contexte, les métiers liés à l’optimisation de l'efficacité commerciale figureront naturellement dans les profils les plus convoités par les entreprises.
Comment ces métiers du pilotage de la fonction commerciale ont-ils évolué ces dernières années ? Quelles sont les attentes des entreprises à l’égard de ces spécialistes de l’efficacité opérationnelle ? Quelles sont leurs missions ? Dans cet article, découvrez le métier de Responsable SFE et de Business Analyst.
Selon le réseau des Dirigeants Commerciaux de France, les commerciaux représenteraient plus de 2,5% de la population active en France, soit plus de 800 000 salariés en 2019. Pour répondre aux exigences d’un marché toujours plus concurrentiel, la fonction commerciale revêt un rôle stratégique. Grâce à leur professionnalisation et aux mutations de leur modèle de compétences, les équipes de commerciaux sont plus que jamais des ressources clés dans la création des conditions de la croissance et du développement des entreprises.
Assurance, banque, grande distribution, industrie, etc., des PME aux grands groupes, en passant par les ETI et start-up, les profils de commerciaux sont très recherchés. De nouvelles fonctions ont par ailleurs vu le jour, notamment des métiers spécialisés dans l’élaboration et le déploiement des stratégies commerciales, de la gestion opérationnelle des équipes de vente. Cela inclut l’optimisation des différents dispositifs de rémunération variable conçus pour inciter les équipes à délivrer le résultat attendu par l’entreprise.
Parmi ces fonctions du pilotage commercial, le responsable Sales Force Effectiveness, ou SFE, est donc "responsable de l’efficacité commerciale" ou encore "responsable de l’efficacité des forces de vente". Plus qu’une fonction support, ce rôle est de plus en plus tenu par des experts des forces de vente. Il a pour mission de concevoir puis déployer des solutions, d’enrichir les process destinés à fédérer les équipes commerciales agissant sur le terrain pour leur permettre de progresser dans la qualité d’exécution de leurs plans d’actions. Parmi ses missions principales, on peut souligner son rôle dans la mise en place et le pilotage de la rémunération variable des forces de vente. Sur ce sujet clé pour la motivation des équipes commerciales, les responsables SFE travaillent en étroite collaboration avec des Business Analyst, également nommés analystes d’affaires ou encore chargés d’études qui leur apportent leur expertise des marchés sur lesquels intervient l’entreprise.
Focus sur deux métiers principaux du pilotage commerciale : responsable SFE et Business Analyst.
Responsable SFE
Des missions variées et de nombreuses interactions avec les différents acteurs de la performance commerciale
En fonction des entreprises et des secteurs d'activités, le SFE peut donc avoir des missions spécifiques et des intitulés de postes différents. Coordination des différentes parties prenantes dans le déploiement d’une solution CRM, exploitation des fichiers clients et préparation des ciblages, conception et animation du plan de primes, conseil et alignement des différentes Business Units. Les missions d’un responsable SFE, comme ceux qui existent depuis de nombreuses années au sein des entreprises du secteur pharmaceutique, sont multiples. Les interactions avec les différents métiers sont quotidiennes, notamment avec les Business Analysts et les directions de Business Unit qui sont leurs principaux interlocuteurs.
Rémunération variable: un besoin de concilier principes directeurs communs et spécificités opérationnelles
S’agissant des plans de rémunération variable des équipes de promotion, souvent dénommés Sales Incentive Plan - SIP, le responsable SFE est garant du respect de la gouvernance transverse entre les différentes Business Unit. La mise en place de principes directeurs de politique de rémunération variable communs à l’ensemble de l’entreprise est placée sous sa responsabilité. Cette politique commune sert de cadre de référence et doit être appliquée de manière homogène pour l’ensemble des collaborateurs des différents départements. Dans l’industrie pharmaceutique, et particulièrement dans les grands groupes, les équipes des différentes BU peuvent représenter plus de 1 000 collaborateurs. Chacune des BU est en charge d’une spécialité propre : les produits grands publics de pharmacie, les vaccins, les médicaments cardio-vasculaires, les traitements de médecine générale, ceux de spécialités hospitalières, etc… Leurs dispositifs d’incitation à la performance ont donc besoin de coller aux enjeux opérationnels de chacun des marchés sur lesquels ces différentes équipes opèrent mais à partir d’un cadre commun garant d’un traitement équitable et facilitant les mobilités internes au sein de l’entreprise.
Parmi les bénéficiaires des dispositifs de rémunération variable pilotés par le responsable SFE, on retrouvera principalement des profils impliqués dans la promotion des médicaments auprès des professionnels de santé : visiteurs médicaux, délégués pharmaceutiques, directeurs régionaux ou responsables de grands comptes. Ces métiers sont par définition, comme dans toutes les autres secteurs d’activités, prioritairement éligibles à la rémunération variable ou aux primes commerciales dans d’autres secteurs d’activités.
Le Responsable SFE peut être amené à manager des équipes, notamment des chefs de projets chargés de réaliser les calculs de primes, parfois en étroite collaboration avec un prestataire spécialiste de la rémunération variable. Les chefs de projets sont également en relation avec de nombreux interlocuteurs en interne. Ces relations transverses sont établies avec la finance, les ressources humaines, les Business Analysts, et certains métiers clés comme les directeurs des ventes ou encore les directeurs des différentes Business Unit. Le Responsable SFE, en charge de la conception des dispositifs de primes, ainsi que l'équipe de chefs de projets en charge du calcul, sont donc en relation avec ces différents acteurs afin de construire les dispositifs de primes qui s’adapteront le mieux aux priorités des différentes BU tout en respectant les principes directeurs de l’entreprise.
“Peu importe la stratégie de chacune des équipes opérationnelles, il faut que nous restions équitables, et que nos règles soient respectées par tous. Une Business Unit ne peut pas prendre des décisions qui seraient inéquitables par rapport aux collaborateurs des autres entités opérationnelles. Nous sommes garants de ces principes directeurs qui sont nos règles communes de fonctionnement et l’on s’assure donc qu'elles soient respectées. “ - Responsable SFE dans l’industrie pharmaceutique.
Le Responsable SFE est le garant de l’équité des systèmes de primes
Les différentes BU d’un même groupe doivent donc observer des règles communes afin de respecter un principe d’équité entre tous les collaborateurs. Ainsi, une BU ne peut pas avoir, pour une même fonction ou des métiers similaires, un enjeu de primes qui serait supérieur à celui d’une autre branche d’activité de l’entreprise. L’ensemble des collaborateurs aux fonctions identiques doit ainsi avoir, non pas le même système de primes, mais une rémunération variable construite sur les mêmes principes structurants.
Toutefois, dans certaines situations, des challenges supplémentaires peuvent être mis en place pour adresser certains contextes commerciaux spécifiques. C’est le cas notamment lors du lancement de nouveaux produits. Dans cette situation précise, la mise en place d’une part modulable spécifique peut être décidée, laquelle se déclenchera en fonction de critères précis, décrits et validés en amont.
Par ailleurs, d’autres situations spécifiques peuvent engendrer la mise en place d’un enjeu de primes supplémentaire. Parmi les plus courantes, l’arrivée sur le marché d’un nouveau concurrent. Enfin, bien que ces situations précisément décrites et encadrées permettent l’activation d’une part supplémentaire de rémunération variable, elles doivent nécessairement respecter une limite d’enjeu maximum.
Un process de prise de décisions collégial animé par le SFE au rythme des cycles de performance
Une réelle gouvernance est le plus souvent mise en place avec chacune des Business Units. Ainsi le responsable SFE intervient, en tant que dépositaire des principes communs et expert, avec les autres membres participants à des comités de prises de décisions.
Avant le démarrage de chaque cycle, le responsable SFE anime le plus souvent un comité primes qui permet de faire le bilan du cycle précédent mais aussi de prendre connaissance des enjeux du cycle suivant, donc de l’orientation stratégique envisagée par les différentes Business Units.
Une fois ces orientations et priorités définies, le responsable SFE peut décliner et concevoir le dispositif de rémunération variable qui sera le plus adapté aux enjeux opérationnels en collaboration directe avec les responsables des équipes de promotion, les directions marketing et sur certains aspects, ceux des ressources humaines.
“En plus des comités réseau et comités BU, sont organisés des comités primes France en général deux fois par an : on se met d’accord avec les patrons de Business Unit sur les grandes directions, les grandes règles. Nous dressons des bilans annuels, analysons nos principes directeurs et questionnons leurs éventuels besoins d’évolution. Nous sommes sur un bilan et un partage et cherchons à tous nous mettre d’accord pour la suite afin d’avancer en bonne intelligence avec tous les interlocuteurs tout au long de l’année.” - Responsable SFE dans l’industrie pharmaceutique.
Pour aboutir à la présentation d’un dispositif cohérent lors des différents comités de réflexion, le responsable SFE multiplie les échanges intermédiaires avec les différentes parties prenantes : directeurs commerciaux, ressources humaines, finance et Business Analyst. En général dans l’industrie du médicament, trois cycles par an sont organisés pour chacune des Business Units. Lors de chacun des comités de validation, le SFE s’attache à favoriser la collaboration, l’écoute, tout en rappelant les règles communes qui fixent le cadre de la réflexion. Véritable force de proposition, sa posture est tournée vers l’échange constructif et collaboratif, il a un rôle de conseil et apporte son expertise auprès des différents décideurs : ainsi la Business Unit ne décide pas seule des dispositifs de rémunération variable qu’elle mettra en place. Ceux-ci résultent d’un travail collaboratif et de prises de décisions collectives.
“Pour piloter l’évolution des dispositifs de rémunération variable, on se doit d’assurer de nombreuses interactions avec les différents départements de notre entreprise notamment les RH, la finance, les différentes BU représentant les départements ventes et marketing, mais aussi, les Instances Représentatives du Personnel qui ont également un rôle à jouer dans la prise des décisions relatives à la rémunération et aux objectifs. Tous ces interlocuteurs sont clés dans le cadre de notre activité, et l’on aura pour chacun d’entre eux un engagement différent. L’ensemble de ces actions de coordination et de pilotage de nos dispositifs sont réalisées avec le support de notre cabinet de Conseil qui nous accompagnent sur cette thématique complexe et critique pour l’entreprise “ - SFE Manager, groupe MSD
“Dans nos échanges avec les ressources humaines, il est parfois nécessaire d’intégrer les instances représentatives du personnel à la discussion et à la négociation autour de l'équité des plans et de la cohérence des montants de rémunération” explique le SFE Manager du groupe MSD. Par ailleurs, il souligne la nécessité de modifier un plan de primes en fonction d’une dynamique particulière ou d’une évolution spécifique de l’environnement. Ainsi, les règles qui sont définies peuvent être ajustées afin de respecter l’équité entre tous les bénéficiaires : enjeu important dans le cadre de la mise en place d’une stratégie de rémunération variable.
Les Business Analysts
Des partenaires clé des responsables SFE
“Mon travail consiste à suivre les ventes de nos produits, les résultats commerciaux, mettre en place des tableaux de bord pour suivre et comprendre nos résultats par société, par commercial. “ - Business Analyst dans l’industrie automobile depuis 8 ans.
Un métier aux exigences multiples : compétences organisationnelles, financières et informatiques
Le Business Analyst est amené à travailler sur la gestion de bases de données, à produire des statistiques et à mettre en place des tableaux de bord, notamment des outils de suivis informatiques ou encore des applications en business intelligence. Une partie de ses missions se fait en collaboration avec les services informatiques, notamment dans le cadre de la gestion des logiciels de bases de données ou encore pour la production de chiffres précis.
Par ailleurs, le Business Analyst est également amené à travailler avec d’autres services, les ressources humaines, la finance, la logistique ou encore le marketing dans le cadre de sa contribution à la conception des plans de rémunération variable pour les équipes de commerciaux dont il suit l’activité.
Un métier au cœur du processus de fiabilisation des données de pilotage
Le Business Analyst travaille en étroite collaboration avec les ressources humaines, notamment pour le calcul de la rémunération variable dont il est responsable dans certaines entreprises. Son rôle est de générer des objectifs, et des résultats par commercial. Pour cela, il s’appuie sur des bases de données RH pour réaliser ses calculs. Si ces dernières ne sont pas à jour, les calculs en découlant ne seront pas précis, et ne reflèteront pas la réalité de la performance opposée aux commerciaux. Ce contrôle de l’effectif se fait avec les équipes des Ressources Humaines dans le but d’identifier en temps réel les commerciaux qui sont effectivement éligibles à une prime, ceux qui sont bien en poste, les nouveaux arrivants qui entrent dans le système de calcul, et ceux qui seraient par exemple sortis des effectifs au cours de l’exercice. La situation réelle des effectifs dans l’entreprise doit être cohérente avec les données RH et commerciales sur lesquelles le Business Analyst base son travail pour élaborer le calcul des objectifs et des primes.
“Notre problème quotidien, et c’est ce qui est le plus difficile à gérer dans notre travail, c’est de s’assurer que nos bases de données sont à jour, car un grand nombre de personnes doivent nous fournir des informations. S’assurer que les données des bases RH sont à jour est un travail qui prend beaucoup de temps et d'énergie. On arrive à le faire au mieux, mais il y a toujours des axes d'améliorations.” - Business Analyst dans l’industrie automobile.
Le Business Analyst doit aimer les chiffres et avoir une appétence pour l’informatique
Le Business Analyst s’apparente donc à un véritable gestionnaire de projet qui intègre les différents besoins de l’entreprise. Ce métier nécessite ainsi de pouvoir maîtriser toutes les compétences liées à la gestion de projet, mais également, du fait de son étroite collaboration avec les directions financières qui cherchent à s’adapter aux différents marchés économiques, de savoir mener des études sur des données chiffrées.
“Je travaille beaucoup avec les bases de données dont j’analyse régulièrement les chiffres. Clairement, il faut avoir le goût des chiffres, et aimer traiter les données, il ne faut pas en avoir peur. Ce travail nécessite beaucoup de concentration, de rigueur, mais aussi de capacités d’analyse. Il faut pouvoir surveiller différents sujets en autonomie et faire preuve de curiosité pour trouver les solutions. Enfin, il faut pouvoir interagir avec les autres personnes et aimer le contact”, nous explique une Business Analyst évoluant dans le secteur automobile.
Les difficultés du Business Analyst : recueillir les informations et les traiter avec efficacité
Capacité d’analyse des multiples données quantitatives et qualitatives de l’entreprise, capacité d’écoute afin de bien comprendre les points de vue des différents départements, capacité de communication à l’égard des divers interlocuteurs, dirigeants de département, mais aussi collaborateurs, etc., le travail du Business Analyst n’est possible qu’avec le développement de nombreuses interactions avec les autres services. Ainsi deux enjeux différents, mais complémentaires, se dessinent : la récolte d’informations d’une part, et l’analyse technique des données d’autre part.
“Je travaille avec le service informatique pour mettre en place les outils de suivis, les applications logicielles spécifiques et la Business Intelligence. Je suis obligée de comprendre en détail comment fonctionnent les bases de données et les serveurs informatiques. Pour moi, ce n’est pas mon métier, mais je suis obligée de comprendre comment ça fonctionne pour qu’on puisse mettre en place ces outils informatiques pour nos équipes de commerciaux. Comme je fais l’interface entre la direction commerciale, y compris les commerciaux sur le terrain, et les services informatiques, je suis obligée de comprendre les deux.” - Business Analyst dans le secteur automobile.
Une adaptation agile à l'organisation de l’entreprise : l’homogénéisation des processus au sein des filiales d’un même groupe
Au gré des acquisitions ou fusions d’entreprises, le Business Analyst doit aussi adapter son travail pour toujours récolter les bonnes informations du terrain. “ce n’est pas évident, car il y a beaucoup de sociétés dans le groupe, chaque société a aussi son historique, sa manière de travailler un peu différente et il faut donc mettre en place les procédures pour harmoniser les fonctionnements. Tous les ans, on a de nouvelles sociétés qui entrent dans le périmètre, donc c’est toujours du temps qu’il faut passer à expliquer comment on procède”.
En fonction de l’organisation de l’entreprise, le Business Analyst devra adapter son travail et tenir compte des différentes filiales, des nouvelles intégrations, qui peuvent avoir lieu tous les ans pour un groupe en pleine expansion. Chaque entité aura sa propre culture et sa vision du business, aussi, il peut être parfois difficile d’homogénéiser l’ensemble des processus de vente, et par extension de rémunération variable à tout un groupe, et aux filiales aux cultures d’entreprises qui peuvent être différentes. “Il faut beaucoup de pédagogie et de temps pour mettre en place des processus qui soient à peu près les mêmes dans toutes les filiales, mais c’est un travail qu’il faut faire pour parvenir à être plus efficace. Chaque société a sa propre culture, sa propre vision du business, donc ça peut être difficile de rendre homogènes tous les processus immédiatement, mais on y arrive toujours !”
Les métiers de responsable SFE ou encore de Business Analyst sont très variés par l’étendue de leurs missions, mais œuvrent tous à un seul et même but : optimiser la performance commerciale des entreprises. Selon les secteurs et les niveaux de responsabilité, ces experts interviennent différemment dans la relation aux managers, mais aussi aux collaborateurs qu’ils souhaitent accompagner au mieux.
Au croisement de l’expertise, du conseil et d’une culture de service, ce sont des métiers dans lesquels trouvent à s’épanouir aussi bien de jeunes cadres désireux de parfaire leur compréhension des enjeux opérationnels avant de rejoindre des fonctions directement opérationnelles mais aussi des collaborateurs plus expérimentés issus des fonctions commerciales dont l’expérience de terrain est précieuse pour ces métiers du pilotage de la fonction commerciale.