Le blog de la rémunération variable

Rémunération variable : Quelles clauses faire apparaître sur le contrat de vos collaborateurs ?

Rédigé par Charles Binet | 28 juin 2018

« La rémunération variable doit indiquer les objectifs à atteindre (qualitatifs, quantitatifs, mixtes), la méthode avec laquelle ils sont évalués et pondérés, le montant de la prime allouée (différents plafonds, différents montants), la durée de la clause d'évolution des objectifs et le mode de fixation de ces objectifs (unilatérale ou d'un commun accord) », Maître Emilie Voiron - Article juritravail.com

Selon la définition officielle du Ministère du travail, le contrat de travail existe dès l’instant où une personne (le salarié) s’engage à travailler, moyennant rémunération, pour le compte et sous la direction d’une autre personne (l’employeur). Le plus souvent, le contrat de travail doit être écrit. Son exécution entraîne un certain nombre d’obligations, tant pour le salarié que pour l’employeur.

Quelles clauses de rémunération variable faut-il faire apparaître sur les contrats de vos collaborateurs ? Quels sont les problèmes à anticiper lorsque l'on fixe les règles au sein du contrat de travail ? Éléments de réponse dans cet article.

L’importance de définir un cadre de rémunération variable en conformité avec la loi

« Si l’employeur ne fixe pas les objectifs, ne précise pas les éléments de calcul de rémunération et/ou la période de référence pour les réaliser, le salarié peut solliciter du Conseil de Prud’hommes le versement de l’intégralité de sa rémunération variable », Maître Mélaine Baillargeat, Cabinet Cassius Avocats – Article courriercadres.com

Le changement de modalités de rémunération variable précisément décrites dans un contrat de travail impliquent la rédaction d’un avenant

Nous retrouvons des mentions obligatoires dans la rédaction d’un contrat de travail qu’elle qu’en soit la nature, CDI ou CDD. Parmi elles, le nom et l’adresse de l’entreprise, le nom et l’adresse du salarié, la date effective du début du contrat, le poste de travail occupé et le lieu d’exercice, la durée du congé payé annuel et ses modalités de calcul, le nombre d’heures hebdomadaires, s’il y a lieu la convention collective en vigueur, les modalités de période d’essai, l’organisme de sécurité sociale auquel l’employeur cotise ainsi que le nom et l’adresse de la caisse de retraite complémentaire et, enfin, les modalités de rémunération. C’est sur ce dernier point qu’il est important d’être vigilant en tant qu’employeur, notamment au sujet de la formalisation des clauses de rémunération variable proposées au salarié.

Historiquement, les employeurs ont tendance à décrire avec beaucoup de précision le système de rémunération variable dans le contrat de travail. 

Néanmoins, cette sur-description des modalités de rémunération variable directement dans le contrat de travail peut s’avérer risquée pour l’employeur. En effet, dès lors que ce dernier souhaitera modifier une modalité de rémunération variable, il procédera à un changement substantiel du contrat de travail qui nécessitera obligatoirement l’accord du collaborateur. Ainsi, le collaborateur pourrait avoir le droit de refuser un changement dans les modalités de l’attribution de sa rémunération variable. Dans cette configuration, l’employeur devrait procéder alors à un licenciement pour désaccord et devrait prendre à sa charge les frais inhérents à ce type de licenciement, souvent conséquents. Si le nombre de salariés refusant la signature de l’avenant au contrat de travail atteint le nombre de 11, alors l’entreprise sera contrainte de mettre en place un PSE, plan de sauvegarde de l’emploi, très coûteux. La modification d’une clause de rémunération variable expressément notifiée dans un contrat de travail implique ainsi nécessairement l’accord préalable du collaborateur concerné.

 

Plusieurs systèmes de rémunération variable peuvent coexister ensemble

L’exemple du secteur de l’assurance illustre parfaitement la complexité de la formalisation du système de rémunération variable. Nous pouvons citer le cas du groupe Allianz qui lors de la mise en place de son nouveau système de rémunération variable, s’est heurté au refus d’une frange minime de salariés, 70 sur un total de 3000 collaborateurs, et s’est vu dans l’obligation de maintenir les anciennes dispositions de rémunération variable en parallèle avec celles nouvellement déployées. Ces salariés ont eu la possibilité de refuser les nouvelles modalités de rémunération variable dans la mesure où ces dernières étaient clairement et expressément notifiées dans leur contrat de travail.

Ainsi, il n’est pas rare d’observer au sein des grandes entreprises la coexistence de deux voire trois systèmes de rémunération variable différents pour les mêmes catégories de salariés. Maintenir plusieurs systèmes différents de rémunération variable revêt une certaine complexité pour l’employeur. Celui-ci devra rémunérer de manière différente des salariés occupant des postes similaires et se conformer aux multiples clauses préalablement négociées, formalisant un système de rémunération variable légal bien qu’obsolète.

La rémunération variable est pensée par nature pour évoluer et être aligner à la stratégie commerciale de l'entreprise. Il est donc cohérent de vouloir la faire évoluer en fonction des objectifs stratégiques de l'entreprise. De cette manière, la rémunération variable est amenée à être repensée à la marge tous les ans et de façon plus structurelle tous les trois ou quatre ans. Dans cette optique, si l’employeur est contraint de demander l’avis et d’obtenir l’accord de tous les collaborateurs à chaque changement de la politique de rémunération variable en vigueur, même infime, il va au-devant de grandes difficultés pour réussir à faire appliquer sa stratégie. Il sera en effet dans l’obligation de proposer des avenants au contrat de travail à chacun de ses salariés concernés et d’obtenir leur accord, ce qui peut être très compliqué dès lors que l’entreprise compte plus d’une dizaine de collaborateurs.


Les informations qui doivent apparaître sur le contrat de travail : délimiter les contours de la rémunération variable

« Les objectifs professionnels, notamment s’ils conditionnent le versement d’une rémunération variable, doivent être fixés au début de la période de référence servant de base d’évaluation pour déterminer s’ils ont été atteints. À défaut d’une telle précision, l’employeur ne peut pas opposer au salarié la non-atteinte de ses objectifs », Maître Mélaine Baillargeat, Cabinet Cassius Avocats – Article courriercadres.com

Notifier l’existence d’un système de rémunération variable sans pour autant en décrire toutes les modalités

Certaines informations liées à la rémunération variable peuvent figurer sur le contrat de travail, notamment celles ayant pour but de rassurer davantage le collaborateur. En outre, l’employeur peut s’engager à proposer une rémunération variable et à citer son poids relatif au regard du package de rémunération global. Il y a en effet peu de chances que la part relative de la rémunération variable varie d’une année sur l’autre, ainsi l’espérance de gain du collaborateur est généralement fixée autour de 20% de son salaire global. Si ce dernier atteint ses objectifs, il sera donc à 20% en performance moyenne.

Mentionner l’existence d’un système de rémunération variable ainsi que son poids relatif permet de rassurer le collaborateur. Il est informé de l’existence d’objectifs qualitatifs et quantitatifs sans pour autant connaître dans les détails, comment et pourquoi les objectifs sont fixés par la direction et le management chaque année. Pour informer les salariés, une note interne définissant les objectifs est édictée tous les ans en fonction des choix stratégiques de l’entreprise.

Néanmoins, l’employeur doit garder à l’esprit que le salarié peut attaquer l’entreprise devant les tribunaux s’il considère que les objectifs fixés sont irréalisables. Ces derniers doivent être S.M.A.R.T, c’est-à-dire spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis pour être conformes à la loi. Pour le cas d’une entreprise où il serait clairement prouvé que plus de 95% de la population de salariés n’a pas réussi à atteindre ses objectifs, il est courant de voir attribuer un « rattrapage de primes » proposé par l’employeur. Cependant, le but premier de l’employeur n’est pas de verser ce rattrapage dans la mesure où il ne présente pas d’intérêt pour le développement de son activité. En effet, la volonté première de l’employeur est d’amener ses salariés vers plus de performance individuelle et/ou collective et de leur verser des primes de rémunération variable en conséquence !