Le projet de réforme des retraites porté par le gouvernement prévoit un recul de l’âge légal de départ à la retraite ainsi qu’un rallongement de la durée de cotisation. Dans ce nouveau calcul, la prise en compte de la rémunération variable questionne de nombreux actifs. Quels éléments du salaire variable sont pris en compte dans le calcul de la retraite et quels changements sont à prévoir avec la réforme ? Décryptage et analyse.
Aujourd’hui, l’ensemble des salariés du secteur privé voient le montant de leur rémunération variable pris en compte dans le calcul de leur retraite. La règle de calcul veut ainsi que tout ce qui est soumis à cotisation soit pris en compte pour la retraite. Cependant, cette règle ne vaut pas pour le secteur public, dont les salariés ne cotisent pas, et dont la retraite est financée par l’État.
Attention ! Seules les primes soumises à cotisation rentrent dans le calcul de la retraite. Ainsi, l’intéressement, n’étant pas soumis à cotisation, ne peut pas être pris en compte dans ce calcul. Tous les autres éléments de la rémunération variable, sont, en principe, soumis à cotisation et considérés comme faisant partie du salaire. Le montant des cotisations dépend, quant à lui, de la catégorie du salarié. Aussi, catégories A, B, C ne participent pas de la même manière, avec des montants plus importants pour la première catégorie.
Les fonctionnaires, pour leur part, ne peuvent demander la prise en compte de leurs primes dans le calcul de leur retraite. Dans les faits, c’est donc un salarié français sur cinq qui ne voit pas ses primes prises en compte pour sa retraite, puisqu’un salarié sur cinq est fonctionnaire. En revanche, la plupart d’entre eux perçoivent une pension de retraite équivalente au montant de leur dernier salaire. À contrario, dans le privé, le montant de la pension de retraite correspond plus généralement, à 50% ou 60% du salaire anciennement perçu.
Jusqu’à présent, la durée de cotisation était de 42 ans et les 25 meilleures années de la carrière servaient de référence pour calculer le montant de la retraite. Le gouvernement souhaite rallonger cette durée à 43 ans en 2027. De plus, l’âge légal de départ à la retraite ne doit plus être de 62 ans mais de 64 ans à horizon 2030 pour les générations 1968 et ultérieures.
Depuis toujours, les salariés du privé redoutent les accidents de carrière qui produisent ces fameux « trous » responsables d’une baisse de leur pension de retraite. Ce mécanisme explique pourquoi le taux de remplacement dans le privé baisse de façon drastique. Une réalité encore plus difficile pour les auto-entrepreneurs lesquels, s’ils n’ont pas de chiffre d’affaires régulier, ne peuvent cotiser à l’Urssaf de façon régulière et voient également diminuer le nombre de trimestres nécessaires pour obtenir leur pension de retraite.
Bien que l’âge moyen de départ à la retraite en France coïncide avec celui de l’âge légal de départ actuel, soit 62 ans, on observe un nombre important d’actifs contraints d’attendre l’âge du taux plein, fixé à 67 ans, pour pouvoir cesser leur activité. En effet, beaucoup de salariés et de travailleurs indépendants n’ont pas cotisé le nombre de trimestres nécessaires pour demander un départ à la retraite avant 67 ans, un âge donnant droit à une retraite à taux plein. Conséquence de ces divers obstacles, une part non négligeable de retraités français perçoit une pension inférieure au SMIC.
Face au nombre de retraités percevant des pensions dérisoires, le gouvernement prévoit également une revalorisation des retraites qui ne devraient plus être inférieures au SMIC. En moyenne, il s’agit d’une augmentation de 400€ du minimum vieillesse. La contrepartie, pour les actifs dont les pensions doivent être plus élevées, est, notamment, un allongement du temps de cotisation. Mais cette augmentation du nombre de trimestres obligatoires pour partir à la retraite à 64 ans vise également à booster l’emploi des séniors.
En matière d’emploi des séniors en Europe, la France fait figure de mauvaise élève. Avec un taux d’emploi actuellement inférieur à 40%, le gouvernement entend bien renverser la vapeur et rattraper ses voisins européens qui affichent une moyenne de 50%. Convaincu que l’âge légal de départ fixé à 62 ans est un frein majeur à l’employabilité des séniors, l’Exécutif veut croire en la vertu de sa nouvelle équation dont la clef consiste à reculer l’âge de départ à la retraite à 64 ans.
C’est une réalité tristement connue : l’accès et le maintien dans l’emploi sont plus difficiles dès que l’on a dépassé la cinquantaine. C’est précisément pour favoriser l’emploi des séniors que le gouvernement veut voir la vie active des Français devenir plus longue. Le pari est audacieux : plus les gens travailleront longtemps, plus il sera naturel pour les entreprises de recruter des séniors, et plus les difficultés d’accès à l’emploi de ces derniers s’amenuiront.
À ce stade, il est impossible de prédire la réussite ou l’échec de cette stratégie. En effet, en imposant deux années de travail supplémentaires, on prend le risque que le calcul des 25 meilleurs années soit moins favorable du fait de plusieurs périodes de chômage en fin de carrière ou d'accidents de parcours tendant à faire baisser le montant de la pension de retraite. Des accidents de carrière d’autant plus favorisés une fois passé l’âge de 55 ans, les difficultés d’embauche augmentant, et la durée d’assurance chômage ne devant pas être revue à la hausse.
Ainsi, si les intentions sont louables, vis-à-vis des salariés séniors, les risques encourus sont conséquents. Une réussite de cette stratégie pourrait modifier positivement le marché du travail pour les cinquantenaires et plus. Mais un échec conduirait à un impact social significatif avec, à la clef, une augmentation de la précarité chez certains retraités.
En voulant réformer le système des retraites, le gouvernement souhaite préserver le système par répartition qui en assure les fondements. Qu’il soit sujet aux critiques ou aux éloges, ce projet de loi braque les projecteurs sur l’évolution de la pyramide des âges en France et son impact pour le financement des futures retraites.
C’est un fait indéniable, le renouvellement de la population française est freiné par une fertilité en baisse. Le vieillissement de la population interroge sur la manière dont seront financées les retraites des générations futures. À l’inverse du système par capitalisation, la France a fait le choix du système par répartition, fondée sur la solidarité nationale. Mais la baisse du nombre d’actifs pourrait mettre à mal cette mécanique bien huilée qui veut que les actifs d’aujourd’hui cotisent pour les retraités actuels.
Pour que les actifs d’aujourd’hui puissent, à leur tour, bénéficier d’une pension de retraite, il faudra un nombre suffisant d’actifs qui cotiseront pour eux. Malheureusement, si, actuellement on compte trois actifs pour un retraité, la tendance indique qu’il ne devrait bientôt plus n’y avoir qu’un seul actif pour un retraité. Une situation suffisante pour déséquilibrer le système par répartition.
Pour éviter de diviser les pensions par trois ou quatre, le gouvernement a fait le choix de proposer cette réforme, actuellement débattue au Parlement. D’autres voix s’élèvent, réclamant la mise en place d’autres formes de financement. Mais actuellement, ce sont les cotisations sociales sous toutes ses formes qui financent le système de retraite, et pour une faible partie l’impôt. Pour sauver le système par répartition, il faut également espérer un renouvellement de la population. Pour y parvenir, la France devra également penser à rattraper son retard pour attirer les talents internationaux.
Le projet de réforme des retraites a pour but de préserver le système par répartition, tel qu’il prévaut actuellement. Parmi les mesures les plus importantes se trouvent l’allongement de la durée de cotisation et le recul de l’âge légal de départ à la retraite . Concernant la rémunération variable, toutes les primes soumises à cotisation, pour les salariés du secteur privé continueront à être prises en compte dans le calcul du montant de la pension de retraite. Ainsi, les primes sur objectifs et les commissions devraient toujours compter pour les futures retraites des actifs français.