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Le commissionnement modulé : une opportunité pour rétablir l’équité dans les équipes commerciales

Le commissionnement modulé : une opportunité pour rétablir l’équité dans les équipes commerciales
07 janv. 2025

Types de primes

Dans le monde hyperconcurrentiel des ventes, la rémunération variable des équipes commerciales figure parmi les leviers majeurs de motivation et de rétention des talents. Historiquement, la commission, modèle de calcul de primes plébiscité par de nombreuses entreprises, a été versée de manière linéaire, basée essentiellement sur le volume de chiffre d’affaires (CA) généré.

Mais ce modèle, certes simple, présente aujourd’hui des limites qui apparaissent de plus en plus criantes à mesure que les équipes commerciales se diversifient et que les attentes des entreprises s’élèvent. Les nouveaux entrants peinent à trouver leur place, les « gros portefeuilles » bénéficient de rentes de situation, et les collaborateurs intermédiaires — le fameux « ventre mou » — peinent à se sentir motivés par un système qui ne reconnaît pas suffisamment leurs efforts de progression.

C’est dans ce contexte qu’émerge le concept de « commissionnement modulé », une approche qui vise à rééquilibrer le rapport de force, à encourager l’effort de progression individuelle et à rétablir une équité essentielle à la motivation des forces de vente.

Qu’est-ce que le commissionnement modulé ?

Le commissionnement modulé se distingue du modèle traditionnel par un principe simple, mais novateur : à résultat commercial identique, un commercial qui a réalisé une forte progression par rapport à sa situation précédente est mieux rémunéré qu’un collaborateur qui, malgré un volume de vente élevé, n’affiche pas de progression ou, pire, régresse. En d’autres termes, ce système couple la rémunération variable au double critère de la contribution (le niveau de CA généré) et de la croissance (la progression réalisée par rapport à un CA initial).

Ce concept apporte une plus grande justice interne : un faible contributeur, certes en retard sur le volume global, mais qui améliore significativement ses résultats par rapport à un cycle précédent, peut percevoir une prime similaire à celle d’un vendeur confirmé en phase de stagnation. À l’inverse, un top-performer disposant d’un large portefeuille de clients pourrait voir sa prime diminuer s’il ne parvient pas à maintenir, voire à augmenter, son volume d’affaires.

Cette mécanique incitative est particulièrement intéressante du point de vue managérial. Les vendeurs en milieu de peloton, souvent peu stimulés par un schéma où doubler leur rémunération nécessiterait de façon irréaliste de doubler leurs ventes, se sentent encouragés à se surpasser. Pour optimiser leur commission, ils doivent aller chercher plus de performance, progresser davantage. Les gros contributeurs, de leur côté, sont contraints de redoubler d’efforts pour préserver le niveau de leurs commissions : le déclin est financièrement pénalisé. Quant aux nouveaux entrants, pour qui la constitution d’un portefeuille conséquent prend souvent des mois, voire des années, ce dispositif valorise enfin leurs efforts de croissance, même si le CA reste initialement modeste.

Les limites du commissionnement classique

Pour comprendre l’intérêt du commissionnement modulé, il convient d’examiner les failles du modèle traditionnel. Le système linéaire, qui rémunère à l’identique chaque euro de CA supplémentaire, part d’une bonne intention : plus vous vendez, plus vous gagnez, un raisonnement compréhensible et transparent. Mais cette simplicité se retourne contre l’entreprise elle-même.

D’une part, le commissionnement linéaire n’exprime aucune exigence réelle. Les objectifs de croissance de l’entreprise — par exemple 10 % de hausse du chiffre d’affaires — peuvent rester lettre morte si chaque commercial se satisfait d’une croissance personnelle plus faible. Sans incitation supplémentaire, il n’y a aucune raison de fournir des efforts intensifs : tant qu’un certain niveau de CA est atteint, la commission tombe, invariable, sans tenir compte de la progression ou du manque d’ambition.

D’autre part, ce modèle traditionnel crée des situations de rente pour certains vendeurs. Les « gros contributeurs » — souvent des commerciaux historiques, aux portefeuilles clients bien garnis — bénéficient d’une rémunération variable presque assurée, proche d’un fixe déguisé. Bien entendu, le maintien de leur CA exige un minimum d’efforts, ne serait-ce que pour renouveler les contrats et éviter les départs de clients. Mais cette contrainte reste souvent faible, comparée à la marge de manœuvre dont dispose un nouveau commercial, qui doit partir de zéro et construire patiemment un portefeuille.

Pour les novices, le tableau est bien plus sombre. Les premières années, leur CA reste modeste, quand bien même ils recrutent activement de nouveaux clients. Dans un système linéaire, cette croissance de leur portefeuille ne se traduit pas immédiatement en rémunération attractive. Le message implicite est décourageant : vous serez bien payé… plus tard, quand vous aurez accumulé assez de clients. Un horizon lointain et incertain qui nourrit souvent le turn-over des jeunes recrues, lassées d’attendre une valorisation à la hauteur de leurs efforts.

Enfin, pour le « ventre mou » des équipes, ces profils intermédiaires qui ne sont ni débutants ni stars, le système traditionnel manque de réactivité. Pour améliorer significativement leur rémunération, ils doivent réaliser un bond énorme dans leurs ventes. L’impact de leurs efforts reste limité, décourageant tout élan de dépassement de soi.

 

Commissionnement modulé : une réponse adaptée pour une activité commerciale de type « élevage »

Pour pallier ces inconvénients, le commissionnement modulé s’avère particulièrement pertinent dans des activités commerciales de type « élevage ». Dans ce modèle, la mission principale du commercial est d’entretenir et de développer un portefeuille client existant, plutôt que de « chasser » de nouveaux prospects chaque mois. L’enjeu est alors de faire fructifier la relation commerciale sur la durée, de réaliser du up-sell ou du cross-sell, de fidéliser les clients, de comprendre leurs besoins pour mieux y répondre.

Dans un tel contexte, le commissionnement modulé apparaît comme une véritable bouffée d’oxygène. Il résout le problème de la rente de situation des gros contributeurs, tout en valorisant les efforts de montée en puissance des nouveaux arrivants. Les premiers doivent désormais justifier leur statut de « top performer » par une progression mesurable, s’ils veulent maintenir leurs gains. Les seconds, quant à eux, sont immédiatement récompensés pour leurs progrès, même si leur niveau de CA reste plus modeste. Ce critère additionnel de la progression permet de conserver dans l’entreprise des profils prometteurs, qui voient enfin leurs efforts porter du fruit sur leur fiche de paie.

Pour le ventre mou, ce système redonne une dynamique interne. Les commerciaux intermédiaires ne sont plus condamnés à un éternel statu quo : en améliorant leurs performances d’un cycle à l’autre, ils gagnent plus. Cette équation leur offre un levier de motivation inédit, susceptible de rehausser sensiblement le niveau global de l’équipe.

Comment fonctionne concrètement le commissionnement modulé ?

Le principe est simple, bien que la mise en œuvre puisse nécessiter un ajustement fin des paramètres mathématiques pour garantir la maitrise budgétaire du système. On part du CA réalisé par chaque commercial et de la progression par rapport à une période précédente (mois, trimestre, année, selon le rythme de l’entreprise). La prime découle alors de deux composantes : d’une part, le volume réalisé sur la période évaluée, et d’autre part, la croissance réalisée par rapport à la période précédente.

Plus la progression est importante, plus la prime associée est élevée, particulièrement pour ceux dont le point de départ est faible. Dans le cas contraire, si un commercial à fort CA initial stagne ou régresse, sa prime diminue, reflétant ainsi un manque d’effort en termes d’amélioration. L’idée, au fond, est de passer d’une logique purement axée sur le résultat absolu à une logique plus nuancée, qui valorise la trajectoire, le chemin parcouru, et non seulement la destination.

Un levier managérial pour stimuler l’ensemble des équipes

Au-delà de la redistribution financière plus équitable, le commissionnement modulé agit comme un levier de management puissant. Il permet aux responsables commerciaux de donner des signaux plus clairs à leurs équipes. Les plus gros contributeurs, dont on attend non seulement du volume mais aussi une stabilité dans la croissance, comprennent qu’ils ne peuvent plus s’endormir sur leurs lauriers. Pour conserver un haut niveau de rémunération, ils doivent non seulement éviter l’attrition, mais aussi chercher à progresser, que ce soit par l’élargissement de la gamme vendue à leurs clients, le renforcement de la satisfaction client, ou le développement de nouvelles opportunités au sein de leurs portefeuilles.

Pour les nouveaux arrivants, le message est enfin encourageant. Plutôt que de devoir attendre des années avant de toucher une rémunération attractive, ils bénéficient d’un système qui reconnaît leurs efforts dès les premières étapes. Cette valorisation précoce peut se révéler déterminante pour fidéliser ces jeunes talents, souvent très mobiles et peu enclins à patienter sans perspectives d’amélioration concrète de leur sort financier.

Quant au « ventre mou », il retrouve un pouvoir d’agir. Loin d’être condamnés à stagner, ces commerciaux intermédiaires peuvent, à travers de modestes augmentations de performance, améliorer sensiblement leur rémunération. L’effet psychologique est considérable : l’effort se trouve gratifié, ce qui encourage une dynamique de progrès continu au sein de l’équipe. Peu à peu, une émulation collective se met en place. Chacun cherche à dépasser son propre record, plutôt que de se comparer uniquement aux autres. Le résultat attendu est un cercle vertueux : en cherchant chacun à progresser, tous participent à l’élévation du niveau global de performance.

Un contexte favorable à l’expérimentation

Il convient de noter que l’émergence du commissionnement modulé s’inscrit dans un contexte économique et technologique propice aux innovations managériales. La digitalisation des processus de vente et la disponibilité de données de performance plus détaillées facilitent la mise en place de formules de calcul sophistiquées. Les outils de CRM et de suivi des ventes fournissent aujourd’hui une granularité permettant d’analyser précisément les progressions individuelles, les historiques de CA, et d’établir des références claires pour chaque vendeur.

En outre, dans un marché du travail concurrentiel, où la guerre des talents fait rage, l’attrait d’un système de rémunération plus équitable et plus stimulant représente un atout précieux. Les candidats peuvent être sensibles à cette dimension, surtout les plus jeunes générations, souvent allergiques aux injustices et peu enclines à accepter un système rigide où seule la performance brute est prise en compte. De plus, dans des environnements où les cycles de vente s’allongent et où la fidélisation client prend une importance capitale, valoriser la progression et non uniquement le volume permet de mieux coller aux réalités du terrain.

Une pratique originale pour plus d’équité et de performance

Le commissionnement modulé s’impose peu à peu comme une alternative sérieuse et innovante au commissionnement linéaire traditionnel. En instaurant un lien indissociable entre la contribution individuelle et la progression réalisée, il rééquilibre les chances entre anciens et nouveaux, incite les meilleurs à maintenir leurs standards, et encourage ceux qui sont dans la moyenne à viser plus haut.

Dans un monde où les enjeux commerciaux sont chaque jour plus ardus, cette approche trouve parfaitement sa place. Elle permet d’exprimer enfin une exigence : l’entreprise ne se contente plus de la simple ambition de chacun, elle fixe un cadre où la progression est valorisée, où le statut acquis ne garantit plus la pérennité du revenu, et où les efforts, même modestes, se voient récompensés.

L’approche permise par ce procédé original, tel que celui proposé par l’expert Primeum, offre ainsi la possibilité de moduler le commissionnement directement selon la performance exprimée en matière de progression individuelle. Le tout, sans perdre de vue une maîtrise optimale des coûts. En réintroduisant la notion de progrès dans la rémunération des commerciaux, le commissionnement modulé se pose en véritable outil managérial d’équité et d’excellence, susceptible de transformer en profondeur la dynamique des équipes de vente.

 

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Auteur de l'article

François Delaage

Directeur des pôles Conseil et Solutions & Services chez Primeum - Expert en rétribution de vos salariés et de vos clients : rémunération variable, intéressement, conditions commerciales, tarification

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