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Dirigeants d'entreprises : les pistes pour vous aider en période de recrutement difficile

Rédigé par Hervé de Riberolles | 02 déc. 2021

Selon une récente enquête de la Banque de France, la part des entreprises françaises rencontrant des difficultés de recrutement a atteint les 53% en septembre 2021.

Hôtellerie-restauration, logistique, santé, services à la personne, grande distribution, etc., de plus en plus de secteurs ont du mal à recruter en cette période de reprise économique. Les difficultés de recrutement arrivent même en deuxième position des principales problématiques rencontrées par les entreprises (32%), juste derrière les difficultés d’approvisionnement en matières premières (42%) selon une récente étude menée par OpinionWay pour Directskills en France.

Les tensions de recrutement sont encore plus fortes dans les PME et les ETI qui déclarent pour 60% d’entre elles souffrir d’une pénurie de profils à tous les niveaux hiérarchiques et sur de nombreuses fonctions. Comment réussir à recruter dans un contexte difficile ? Dans cet article, des pistes concrètes à destination des dirigeants pour attirer et garder les talents.  

Difficultés de recrutement : l'état des lieux

Avec la levée des contraintes sanitaires, les difficultés de recrutement et le taux de chômage retrouvent leur niveau d’avant-crise dans la plupart des pays européens.

D’après la DARES, le marché du travail français semble retrouver sa situation d’avant-crise. Le taux de chômage de mi-2021 est similaire à celui observé fin 2019 : grâce à la levée des contraintes sanitaires, les recrutements reprennent… et les difficultés associées également. Les tensions de recrutement qui existaient avant la crise sanitaire, s’accentuent même dans certains secteurs où la pénurie de main-d’œuvre se fait de plus en plus sentir (BTP, restauration, services à la personne pour n’en citer que quelques-uns).

Au deuxième trimestre 2021, le taux de chômage en France s’est établi à 8% (contre 8,1% fin 2019) : un chiffre qui décrit une demande des entreprises mise sous tension par un nombre insuffisant et une inadéquation des profils disponibles sur le marché de l’emploi. Ainsi, toujours selon les chiffres de la DARES, la part des entreprises qui signalent des difficultés de recrutement est en forte hausse depuis juillet 2021, retrouvant des niveaux proches de ceux d’avant-crise dans la plupart des secteurs d’activité, excepté pour les matériels de transports et, dans une moindre mesure, l’agroalimentaire et les transports. Avec la remise en marche de l’activité économique, les embauches qui avaient fortement reculé pendant la crise sanitaire, ont donc repris tout comme les pénuries de main-d’œuvre associées.

On observe les mêmes difficultés de recrutement dans toute la zone euro. Avec un taux de chômage moyen qui s’établit à 7,5% en août 2021, soit un niveau similaire à celui de fin 2019, la plupart des pays européens rencontrent des pénuries de main-d’œuvre. Comme en témoigne Andrew Baxter, directeur général d’Europa Worldwide, entreprise britannique de logistique dans un article lemonde.fr, « face aux difficultés de recrutement, j’ai dû augmenter le salaire de ma cinquantaine de chauffeurs routiers de 20%, simplement pour les garder. Sans la hausse du salaire, ils seraient partis ailleurs ». Même constat en France pour Amel Ziani Orus, directrice des ressources humaines au Meurice, célèbre palace parisien, pour laquelle recruter du personnel en cuisine relève aujourd’hui de la mission impossible : « d’habitude, nos petites annonces sur notre site attirent les candidats. Mais en ce moment, on ne reçoit pas de CV. On a fait appel à trois cabinets de recrutement et aucun n’a réussi à nous proposer un CV. »

 

La hausse des tensions entre 2015 et 2019 provient en partie d’un défaut d’attractivité dans une trentaine de métiers

Selon la DARES et des enquêtes INSEE, les difficultés de recrutement tirent leurs origines de plusieurs facteurs différents :

  • Une offre de travail inférieure à la demande (c’est-à-dire que le nombre de profils disponibles sur le marché est inférieur à celui des offres d’emploi émises par les entreprises).
  • Des revenus de remplacement trop peu incitatifs à la reprise d’emploi en comparaison avec les salaires proposés par les entreprises (chômage et minima sociaux).
  • Une mobilité limitée des travailleurs et des contraintes géographiques qui créent des déséquilibres locaux du marché du travail.
  • Un déficit de compétences sur les métiers qui recrutent et qui conduit indéniablement à une pénurie de main-d’œuvre (on parle également de « skill mismatch » lorsque trop peu de personnes sont formées aux métiers pénuriques).
  • Un déficit d’attractivité de certains métiers techniques, manuels ou encore méconnus (des conditions de travail ou de salaires trop dégradées découragent les candidats)
  • Une intensité des embauches sur une même période de temps. Après des mois de gel des recrutements ; avec la réouverture de pans entiers de l’économie, des centaines d’entreprises ont cherché à recruter au même moment un grand nombre de profils identiques. Les difficultés de recrutement ont alors bondi et ne se sont que très légèrement atténuées avec l’arrivée sur le marché de l’emploi des demandeurs auparavant bloqués par la crise sanitaire.

 

Les défis à relever pour recruter les profils de demain

Vérifier que le modèle économique permettra d'absorber les inévitables augmentations de salaires

Selon une récente étude du cabinet de recrutement Robert Half, l’année 2022 devrait être marquée par une hausse généralisée des salaires. Comptabilité, juridique, informatique, etc., de nombreux métiers connaîtront une revalorisation salariale sur le marché de l’emploi. Aussi, l’un des premiers défis que devra relever l’entreprise, est de s’assurer que son modèle économique permette réellement d’absorber ces inévitables augmentations de salaires.

Quand certains grands groupes auront plus de facilité à rehausser le salaire fixe, d'autres entreprises aux moyens parfois plus limités, devront se montrer plus ingénieuses dans leur proposition de valeurs aux candidats et à leurs collaborateurs. Espaces de travail agréables, télétravail, plan de carrières, formations, etc., un certain nombre de critères peut permettre aux entreprises de se différencier sur le marché candidats et de continuer à attirer des talents. Notons que la proposition d’une rémunération variable permettant réellement de récompenser les performances individuelles peut être un véritable élément différenciant dans une stratégie de recrutement de profils pénuriques, notamment de commerciaux.

Changer ses habitudes de recrutement

Le deuxième défi pour les entreprises ? Changer leurs habitudes de recrutement. Alors que plus de 85% des emplois de 2030 n’existent pas encore selon une étude publiée par Dell et l'Institut pour le Futur, il est plus que jamais nécessaire de se concentrer sur les soft skills du candidat, et notamment sur sa capacité d’adaptation et d’apprentissage.

Il s’agit ici de ne plus recruter uniquement en fonction de ce que fait le candidat ; mais de capitaliser sur ce qu’il pourrait faire demain et sur sa capacité à changer de missions, de poste et d’environnement. L’approche classique du sourcing de candidats basée uniquement sur les diplômes et l’expérience montre ses limites et ne permet plus de satisfaire les besoins en recrutement des entreprises. Ainsi, on voit fleurir de plus en plus d’offres d’emploi et de processus de recrutement qui ont vocation à attirer des talents sur la base de leurs compétences personnelles transposables et plus particulièrement sur leur personnalité et soft skills (savoir-être).

Par ailleurs, autre élément essentiel à la réussite d’une stratégie de recrutement : éviter les politiques contre-productives du « Stop and Go ». En effet, il est beaucoup plus pertinent d’anticiper ses futurs besoins en recrutement, en constituant des viviers de candidatures qualifiées et activables rapidement, que de lancer un recrutement en urgence dès lors qu’un besoin s’ouvre. Le succès des entreprises qui parviennent à réduire les délais de recrutement repose ainsi principalement sur leur capacité à faire vivre une base pertinente de candidats et à anticiper leurs futurs besoins en compétences.

Attirer les talents suppose de développer sa marque employeur 

95 % des personnes en recherche d’emploi glanent des informations à propos de l’employeur auprès duquel elles postulent (Étude StepStone – Marque Employeur : La communication au-delà du battage publicitaire).

La marque employeur est essentielle si vous souhaitez attirer les profils dont vous avez besoin. Partie intégrante de la stratégie RH, elle doit reposer sur un socle tangible, l’offre RH qui regroupe l’ensemble des prestations, des programmes et des politiques RH de votre entreprise (programme d’intégration et de formation, politique de mobilité interne, bien-être et QVT, environnement de travail, politique de rémunération, etc.).

La marque employeur renvoie directement à la notion d’attractivité de l’entreprise sur le marché de l’emploi et joue un rôle d’attraction et d’engagement auprès des candidats et salariés, comparable à celui qu’exerce la marque commerciale sur les consommateurs. Une marque employeur efficace agit donc sur la réputation de votre entreprise en véhiculant une image positive et augmentant mécaniquement le volume de vos candidatures entrantes, et notamment celles de talents se reconnaissant dans les éléments de votre politique RH.

 

Définir de vraies valeurs et donner un sens à son projet de business : quelle est ma raison d'être ?  

De nombreux éléments participent à ce qui façonne la culture d’une entreprise : son histoire, sa mission, ses valeurs, sa politique de recrutement et de formation, mais aussi et surtout sa raison d’être. 

La raison d’être d’une entreprise reflète sa culture, la manière dont elle fonctionne, se caractérise au quotidien et qui la rend unique, au-delà de son secteur et son domaine d’activité. Le vrai défi pour l’entreprise sera alors de définir de réelles valeurs et réussir à donner un sens à son projet économique pour susciter une appartenance et une adhésion collective. Notons que les engagements RSE prennent une place de plus en plus importante dans la communication des entreprises à l’égard des candidats, mais aussi de tout son écosystème. Une raison d’être claire et en phase avec les valeurs de la société est un puissant levier de recrutement et de fidélisation de collaborateurs.

La rémunération variable pour relancer les recrutements des postes les moins attractifs à tous les niveaux de l'entreprise

Parmi les moyens d’attirer de bons candidats les moins valorisés par les recruteurs, on retrouve la rémunération variable. Une majorité de professionnels RH et de recruteurs sous-estime l’impact que peut avoir un bon système de rémunération variable dans l’attraction de candidats. La plupart éprouve par ailleurs des difficultés à en cerner les différents aspects et c’est sans surprise qu’ils peinent à mettre en valeur la rémunération variable dans le cadre d’une négociation avec un candidat ou un collaborateur.

Dans un contexte de guerre des talents, proposer une politique de rémunération attrayante et en maîtriser le fonctionnement n’est plus une option tant elle peut s’avérer décisive dans le choix d’un candidat à rejoindre ou non votre entreprise.

Par ailleurs, la rémunération variable est un levier de recrutement intéressant pour les fonctions support et les postes considérés comme peu attractifs pour les candidats (métiers situés en bas de l’échelon hiérarchique ou difficiles) et permet de récompenser plus justement les performances individuelles. 

Nouveaux leviers de motivation pour attirer les jeunes talents

Selon une étude de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) de mai 2021, 25% des jeunes diplômés de 2019 niveau Bac+5 étaient encore en recherche d’emploi en janvier.  Par ailleurs, 81% d’entre eux utilisent leur mobile dans leur recherche d’emploi et accèdent à leur CV depuis leur smartphone.

Les usages de candidatures se digitalisent. LinkedIn, Twitter, mais aussi Snapchat, TikTok et Twitch permettent aux entreprises de toucher une cible plus jeune. « McDonald’s a recruté des équipiers sur Snapchat, Système U a diffusé sur TikTok de courtes vidéos qui ont généré des millions de vues et une soixantaine de candidatures d’apprentis bouchers, métier manquant cruellement de candidats. Plus original encore, la société d’intérim Proman a recruté sur Tinder, l’utilisateur matchait avec le job proposé en « swipant » à droite s’il souhaitait poursuivre l’aventure avec la société ! » explique Dalale Belhout, Responsable Marketing RH et Marque employeur chez DigitalRecruiters dans un article publié par la Tribune Verte en octobre 2021.

Néanmoins, si la nouvelle génération est ultra-connectée, 80% des jeunes préfèrent encore rencontrer un recruteur en présentiel plutôt qu’en virtuel, et 91% d’entre eux souhaitent jouir d’une plus grande immersion dans la culture d’une entreprise avant de la rejoindre (visite des locaux, rencontre avec la future équipe, etc.).

G/ Former et renforcer les compétences

Dans ce contexte de pénurie des talents, le gouvernement propose un plan de réduction des tensions de recrutement, mis en place dès le 1er octobre, et visant à (source : viepublique.fr) :

  • Former les salariés et favoriser les reconversions professionnelles (dispositif Transitions collectives : l'État prend en charge tout ou partie de la rémunération des salariés, y compris les cotisations sociales légales et conventionnelles, et le coût pédagogique des formations certifiantes, sur une durée maximale de 24 mois) ;
  • Amplifier l'effort de formation des demandeurs d'emploi afin de répondre spécifiquement aux besoins des entreprises (formations sur mesure, promesses d'embauche). 

Par ailleurs, un plan spécifique pour les demandeurs d'emploi de longue durée est déployé autour de deux actions principales :

  • La remobilisation des demandeurs d'emploi grâce à un diagnostic personnalisé et des mises en situation ;
  • Une aide à l'embauche en contrat de professionnalisation (statut de salarié, intégration dans l'entreprise, accès à une qualification professionnelle reconnue, aide de 8 000 euros à l'employeur pendant la première année).