Dans le Vaucluse, une société spécialisée dans l'isolation des combles a décidé d'offrir une prime canicule de 20 euros brut par jour à ses salariés pendant la période estivale. Attachée au bien-être de ses salariés, l'entreprise orangeoise Everest-Isolation avait déjà versée l’an passé « une prime été » et offert à tous des gilets rafraîchissants et des masques ventilés pour améliorer les conditions de travail sur les chantiers. Ces initiatives en faveur des salariés ont d’ailleurs été récompensées par le premier prix RSE PACA.
Prime canicule, prime d’éthique, prime de fidélité, prime d’assiduité, ou encore de remplissage de CRM … toutes les primes sont-elles vraiment justifiées ? Si la prime canicule prend tout son sens lors de périodes de fortes chaleurs, qu’en est-il de la prime du « marathon de la féminité » destinée à récompenser les femmes venant au travail « en jupe et bien maquillées » ? Dans cet article, tour d’horizon du bien-fondé de certaines primes, plus ou moins originales !
D’après des informations révélées par le magazine Envoyé Spécial, il existerait une prime d’éthique reversée à des footballeurs du Paris-Saint-Germain. Selon ces médias, Neymar toucherait ainsi « 375.000 euros par mois de bonus pour saluer et remercier les supporters ».
En réponse à cette polémique, le club parisien a précisé que cette prime d’éthique faisait partie intégrante du salaire global des joueurs. Elle ne représente pas de bonus, mais se présente comme un « malus » infligé au joueurs qui ne respecteraient pas certaines règles de conduite. Ainsi, l’intégralité des joueurs du PSG bénéficie d’une prime d’éthique directement intégrée au salaire mensuel, cette dernière varie selon le standing du joueur de 33 000 à plus de 375 000 euros pour les joueurs stars. La prime d’éthique serait ainsi « proportionnelle au talent » et « les montants proposés à chaque joueur ne seraient ainsi pas les mêmes ».
Néanmoins, le club parisien précise qu’il ne s’agit pas uniquement d’une prime « d’applaudissements de supporters ». Pour percevoir l’intégralité de cette prime, les joueurs doivent respecter une douzaine de règles bien précises. Parmi elles, le comportement envers leurs coéquipiers et adversaires, la ponctualité et l’assiduité aux entraînements ou encore le respect des engagements des joueurs envers les médias. Les joueurs du PSG ne sont pas les seuls à toucher une prime d'éthique car d'autres grands clubs comme l'Olympique Lyonnais l'ont mise en place.
Les clubs n’hésitent pas à retirer la prime d’éthique pour sanctionner le comportement des joueurs. Ainsi, le PSG a fait le choix de retirer sa prime d’éthique à Serge Aurier suite à « l’affaire Periscope » ou encore à Marco Verrati, lequel avait été contrôlé avec un taux d’alcoolémie au-dessus de la limite autorisée. Ces primes confisquées sont alors reversées à la fondation du club. Claude Mitchy, Président du Clermont Foot, en Ligue 2, qui utilise également ce procédé, indiquait à ce sujet que « la prime d’éthique est le meilleur moyen de sensibiliser les joueurs sur le respect des règles. Pour qu’ils comprennent, il faut toucher à leur porte-monnaie. Quand on franchit la ligne jaune, il faut punir ».
La prime d'éthique mise en place dans les grands clubs de football s'apparenterait plutôt à un système de bonus-malus basé sur la tenue de poste des joueurs plutôt qu'à une prime de performance. C'est parce que le droit du travail français interdit les retenues sur salaires que les clubs ont décidé de mettre en place un tel mécanisme pour que le non-respect des règles ne nuise pas à l'image du club tout en impactant les joueurs.
Pour illustrer la prime d'éthique en entreprise, nous pouvons prendre le cas d'un salarié qui utiliserait son téléphone de manière intempestive pendant une réunion. Ce système permettrait à l'employeur de retenir une part de sa rémunération variable pour sanctionner un comportement qui relève de la tenue de poste de son collaborateur. Ce type de système n'est pas envisageable et ne constitue en aucun cas une prime car elle relève plus de la tenue de poste du collaborateur que de sa performance.
Par ailleurs, le fait de verser d'indexer la prime en pourcentage du salaire du joueur (Neymar touche beaucoup plus que certains de ses partenaires) est une bonne pratique pour que cette prime reste motivante pour tout le monde.
Afin de lutter contre un manque de main-d’oeuvre, la chaîne de restauration canadienne Shaker Cuisine et Mixologie a mis en place un système de « primes de fidélité » pour ses employés. Tous les 12 mois, un cuisinier et un plongeur recevront ainsi un chèque pouvant aller de 1000 à 2000 dollars ! L’enseigne de restauration entend lutter contre le problème de la rareté de la main-d’œuvre et espère ainsi stabiliser ses effectifs grâce à ce système de primes de fidélité.
Cette mesure, qui sera proposée dans les 14 restaurants que compte l’enseigne et à ses 800 collaborateurs, coûtera environ entre 250 000 et 400 000 dollars par an. Ainsi, les chefs et sous-chefs cuisiniers toucheront 2000 dollars par an, sous la forme de chèque de 1000 dollars tous les six mois pour les inciter à rester au sein de l’entreprise et ne pas vérifier si l’herbe est plus verte ailleurs.
Par ailleurs, un système de récompenses d'avantages en nature a également été mis en place en parallèle des « primes de fidélité ».
Les salariés pourront recevoir ainsi des vêtements, des chèques-cadeaux, mais aussi des appareils électroniques, voire gagner des voyages, toujours dans le but de les fidéliser davantage et de lutter contre le turn-over, très important dans le secteur de la restauration. Selon M. Beaumont, directeur de la chaîne, « cette décision est pour récompenser nos employés actuels et offrir des conditions compétitives pour le recrutement de nouveaux employés de cuisine, un emploi primordial en restauration, mais sous-valorisé ».
Nul doute que la prime de fidélité et les avantages en nature offerts aux salariés favoriseront leur rétention et également l’attraction de nouveaux talents mais ce système est-il vraiment efficace ?
Cette prime de fidélité repose un système d'attribution aléatoire faisant de ce plan de prime, un système inéquitable. En effet, les collaborateurs seront chacun leur tour récompensé pour leur fidélité plutôt que pour leur performance au travail. Une solution s'avérant efficace sur du court terme mais qui devrait être soutenue par des augmentations de salaires sur le long terme récompensant la fidélité et l'ancienneté des collaborateurs.
Dans le cadre de l’organisation d’un « marathon de la féminité », l’entreprise russe Tatprof a décidé d’offrir des primes à ses employées qui viendraient au travail « en jupe et bien maquillées ».
Selon Anastassia Kirillova, la porte-parole de la société spécialisée dans l'industrie de l'aluminium, l’initiative du marathon a été prise pour « embellir les journées de travail ». « Beaucoup de femmes mettent un pantalon automatiquement, c'est pourquoi nous espérons que cette action permettra à nos dames de sentir leur féminité et leur charme lorsqu'elles opteront pour une jupe ou une robe », poursuit-elle. Ce marathon d’un mois, destiné à promouvoir « la féminité » des collaboratrices dans le but « d’unir les équipes », a suscité de nombreuses réactions en Russie, mais aussi dans d’autres pays européens.
Ainsi, du 27 mai au 30 juin 2019, chaque employée venant « en jupe et bien maquillée » a pu toucher une prime de 100 roubles par jour, soit l’équivalent d’un euro quarante. De leur côté, les hommes salariés de l’entreprise se sont vu proposer des épreuves physiques, comme notamment des compétitions de tractions. « C'est une excellente manière d'unir notre équipe composée à 70 % d'hommes. Ce que veut le PDG de l'entreprise, c'est que l'essence féminine des employées de l'entreprise soit maintenue, que les jeunes femmes n'aient pas de coupes masculines, ne changent pas leur tenue pour des pantalons […] qu'elles projettent toute leur chaleur dans l'éducation des enfants » a indiqué la porte-parole de la société, en insistant sur le fait que le port de pantalons restait un droit pour les femmes salariées de l’entreprise. Cette conception sexuée de la tenue vestimentaire imposée aux collaboratrices a été qualifiée de « sexiste », notamment sur les réseaux sociaux où elle a suscité un badbuzz.
Avec la mise en place de ce « marathon de la féminité », Tatprof décide de récompenser ses collaborateurs en fonction de leur habillement et de leur genre plutôt qu'en fonction de leur performance. Elle est structurellement inéquitable, pose un problème d'éthique sexiste et n'est aucunement liée à la pratique de l'activité professionnelle dans l'entreprise.
La prime d'assiduité est une prime versée par l'employeur à un salarié en vue de récompenser son taux de présence dans l'entreprise. Le Code du travail n'impose pas d'obligation à l'employeur en ce qui concerne le versement d'une prime d'assiduité en faveur de ses salariés. Cette prime, destinée à récompenser la présence effective d'un salarié dans l'entreprise, peut en revanche être imposée par d'autres textes, à savoir un engagement unilatéral de l'employeur, le contrat de travail, la convention collective ou encore un accord collectif.
Dès lors que l'employé est absent, la prime peut être réduite ou supprimée, à condition bien entendu que cette suppression soit fondée sur des critères objectifs et non sur des motifs discriminatoires. Elle n’est pas la contrepartie d’un travail fourni et n’entre donc pas en compte dans le salaire minimum.
Nous pouvons citer l’exemple des agents de la fonction publique territoriale ou de certains cheminots du Groupe SNCF qui bénéficient d’une prime d’assiduité récompensant leur taux de présence à leur poste. En plus de leur rémunération habituelle, composée d’un salaire de base et d’une partie complémentaire, les agents peuvent espérer toucher une prime d'assiduité.
Cette prime est inefficace et ne devrait pas être incorporée dans un plan de rémunération variable des salariés car elle relève de la tenue de poste : il est normal de venir au travail et de percevoir un salaire en échange. Ce système est souvent utilisé pour contourner la mise en place d'une pénalisation du salarié qui serait trop souvent absent.
La prime de remplissage du CRM consiste à offrir un bonus aux salariés remplissant correctement le logiciel de gestion des ventes. Pour un commercial, il s’agira de le récompenser si ce dernier a bien tenu, et donc enregistré, la totalité de ses besoins en cours, le contenu de ses rendez-vous de prospection ainsi que leur objectif, le suivi de ses projets, etc.
Ce système est souvent mis en place au sein des entreprises pour obliger les commerciaux à mettre à jour et suivre cette base de donnée partagée.
La bonne tenue du CRM devrait être naturellement incluse dans la tenue de poste et ne devrait pas faire l’objet d’une prime particulière. En effet, il est normal pour un commercial souhaitant gérer aux mieux ses leads commerciaux et son portefeuille clients, d’entrer au fur et à mesure les informations clés de chacun de ses appels ou encore de ses rendez-vous commerciaux. Cette prime incite le commercial à passer un temps relativement long à saisir des informations dans le CRM l’éloignant de sa mission principale : générer plus de business.
Aussi, la tâche de saisie de données dans le CRM devenant primordiale car donnant lieu à une prime, on risque de voir la qualité des informations renseignées baissées car les commerciaux auront tendance à remplir des éléments même quand ils n'en sont pas sûrs pour être assurés de toucher leur prime.