Le « Dieselgate », aussi appelé « l’affaire Volkswagen », a eu l’effet d’une bombe dans l’industrie automobile mondiale et plus particulièrement en Allemagne, dont la célèbre marque est l’un des fleurons à l’export. En septembre 2015, l'Agence américaine de protection de l'environnement (EPA) accuse la marque allemande d’avoir équipé plus de 11 millions de ses véhicules diesel d’un logiciel capable de fausser les résultats des tests antipollution.
Ce scandale industriel sans précédent dans l’histoire de l’automobile dénonce les différentes pratiques utilisées entre 2009 et 2015 par le groupe pour réduire frauduleusement les émissions polluantes de certains moteurs diesel, mais aussi essence, lors de tests officiels d’homologation. Les marques Volkswagen, Audi, Seat, Škoda et Porsche, sont concernées par cette affaire, qui a entraîné la démission du président du directoire du groupe, Martin Winterkorn.
Quatre ans après les faits, Volkswagen essaie de sortir la tête de l’eau et décide de mettre en place un nouveau système de rémunération variable pour ses cadres. La firme allemande emblématique, bien qu’ébranlée par cette affaire de tricherie aux tests de pollution, tente de redorer son image et capitalise sur la motivation de ses salariés.
En quête d’une nouvelle image après l’affaire du Dieselgate, le groupe Volkswagen a donc mis en place un nouveau modèle de primes afin de développer des comportements plus collaboratifs chez les cadres de l’entreprise. En calquant ce nouveau modèle de rémunération sur celui des membres du directoire, qui fait la part belle aux objectifs collectifs, le groupe espère davantage centrer la performance sur les réalisations collectives plutôt que sur les performances individuelles.
Instauration d’objectifs collectifs, sanctions des actes répréhensibles avec baisse de salaire fixe, ou encore attribution d’actions virtuelles via un plan d’actions de performance, découvrez dans cet article, une analyse du nouveau système de rémunération des cadres mis en place par Volkswagen !
Une refonte du système du salaire variable calqué sur celui du directoire
Un nouveau modèle de rémunération variable pour encourager la coopération entre collaborateurs de différentes régions
Le groupe Volkswagen a opté pour une refonte du système de rémunération variable en le calquant sur celui de son directoire. Ce nouveau système pour le salaire variable des cadres dirigeants a pour but de renforcer « l’idée de groupe » et d’encourager « la coopération entre les marques et les régions. » L’attention de la stratégie de rémunération variable est donc davantage portée sur le collectif que sur l’individu.
Notre avis d’expert : un plan de rémunération variable pertinent doit être décliné « de haut en bas » et être cohérent pour l'ensemble des collaborateurs. Pour être efficace, le plan doit ainsi se décliner depuis la stratégie commerciale et traverser les différents échelons de management afin de donner le cap à l'organisation. Ainsi sont créés des « dispositifs miroirs » qui permettent de relayer la stratégie de rémunération variable découlant de la stratégie de l'entreprise.
Une prime de performance individuelle supprimée
Le groupe a choisi de supprimer la prime de performance individuelle et de mettre en place un système davantage orienté vers le collectif
La suppression de la prime de performance personnelle vise à renforcer l’esprit d’équipe et à réduire l’importance des intérêts personnels et individuels. Dans ce contexte de valorisation du travail collectif, les objectifs du groupe sont renforcés et représenteront désormais au moins la moitié du salaire variable des cadres dirigeants, lesquels pesaient jusqu’alors seulement un tiers de leur rémunération totale.
Notre avis d’expert : la volonté de l’entreprise est clairement de favoriser une meilleure coopération entre ses différentes marques, dans différentes régions. Néanmoins, faire le choix de supprimer les primes de performances individuelles et d’instaurer uniquement un système d’objectifs collectifs peut présenter certains inconvénients.
Tout d’abord, un système d’évaluation basé uniquement sur des critères collectifs peinera à distinguer et à récompenser les efforts fournis individuellement par les collaborateurs les plus impliqués. Ensuite, ce système, de par son fonctionnement, peut s’apparenter à de l’intéressement, dispositif qui vient déjà rémunérer la participation de chaque salarié aux différents projets collectifs de l’entreprise.
Pour être efficace, un système de rémunération variable doit être capable de produire de la motivation. De la sorte, il ne doit pas récompenser deux fois le même effort et donc la même performance. Dans un contexte où la performance individuelle serait difficilement mesurable, quantifiable et interprétable, il est courant d’observer la mise en place d’objectifs collectifs dont l’évaluation est basée sur des critères communs de performance.
Dans le cas précis de Volkswagen, nous sommes dans une configuration où il est tout à fait possible d’identifier des critères de performance individuelle des cadres. En effet, le groupe est doté d’un système de CRM intégré en mesure de prendre en compte les éléments de salaire variable et d’évaluation d’ordre individuel. Ainsi, dans la mise en place d’une stratégie de rémunération variable, instaurer une part de collectif peut être pertinent, mais baser uniquement un système de rétribution sur cet aspect peut être, au contraire, contre-productif et ne plus générer de motivation chez les salariés.
Par ailleurs, nous pouvons reconnaître à la mise en place d’objectifs collectifs certains effets bénéfiques. La création d’un lien collaboratif peut avoir du sens, notamment dans un contexte où les résultats attendus dépendent directement de la qualité d’un travail en commun entre plusieurs personnes aux fonctions différentes. Enfin, l’instauration d’objectifs collectifs permet de lutter directement contre les comportements individualistes, parfois exacerbés dans certains environnements de travail.
La mise en place d’un plan d’attribution d’actions Volkswagen pour les cadres
Le dispositif d’attribution d’actions n’est pas un système de rémunération variable
Concernant les primes à long terme, le groupe Volkswagen a choisi d’attribuer chaque année des actions virtuelles à ses cadres via un plan d’actions de performance. Ces derniers recevront ainsi, après une période de trois ans, un versement indexé à l’augmentation de la valeur des actions et au niveau de bénéfices qui leur est associé. L’entreprise allemande met en avant ce lien entre rémunération variable et valeur en actions comme un moyen d’envoyer un « signal positif aux investisseurs ».
Notre avis d’expert : cette partie du dispositif communiqué par Volkswagen ne relève pas d’un système de rémunération variable. Il s’agit d’un dispositif destiné à la rétention des cadres et visant directement à les fidéliser sur les prochaines années. L’essence même de la rémunération variable est la valorisation de la performance, et non pas la rétention des talents.
Néanmoins, l’intérêt d’un dispositif de rétribution basé sur la valeur d’actions réside en une fiscalité avantageuse. En effet, comparativement au système de primes de performance traditionnel où l’on retrouve un certain nombre de charges sociales et fiscales, ce dispositif de valorisation grâce à des actions virtuelles est relativement avantageux d’un point de vue fiscal.